Récemment, un entrepreneur nous a dit : « En tant que femmes, vous vous ferez toujours marcher dessus dans ce milieu. » Cette phrase nous a interpellées. Pas parce qu’elle était fausse, mais parce qu’elle révélait une réalité : on nous fait moins facilement confiance, on teste plus souvent notre expertise, on tente plus volontiers de nous arnaquer.
Face à cette réalité, beaucoup de femmes entrepreneures développent des stratégies spécifiques. Des stratégies qui, paradoxalement, se révèlent souvent plus efficaces que les approches traditionnelles. Voici ce qu’on a observé, vécu, et ce que ça nous apprend sur l’entrepreneuriat d’aujourd’hui.
Le syndrome de la légitimité pour les femmes entrepreneures perpétuellement questionnée
« Qui est votre gérant ? » Cette question, combien de fois l’a-t-on entendue ? Jamais posée avec malveillance, mais systématiquement présente. Nos compétences sont scrutées, analysées, remises en question d’une manière qu’on observe rarement avec nos confrères masculins.
Les conséquences inattendues
Cette remise en cause permanente nous pousse à une sur-préparation constante. On arrive en rendez-vous avec trois fois plus de données que nécessaire. On anticipe toutes les objections possibles. On structure nos argumentaires de manière quasi-scientifique.
Résultat ? On développe une rigueur et une précision qui impressionnent souvent nos interlocuteurs. Ce qui était au départ une contrainte devient un avantage concurrentiel.
L’effet miroir
Cette exigence de preuves nous oblige aussi à mieux nous connaître. On identifie nos forces et nos faiblesses avec une acuité particulière. On sait exactement ce qu’on sait faire, et surtout ce qu’on ne sait pas faire.
L'art délicat de la négociation
Les négociations ne se déroulent pas de la même manière pour nous, femmes entrepreneures. On nous teste différemment. Les interlocuteurs masculins ont parfois tendance à adopter une approche plus agressive, pensant peut-être qu’on cédera plus facilement.
L’adaptation nécessaire
Face à cela, on développe des techniques de négociation plus subtiles. Moins frontales, mais souvent plus efficaces. On apprend à désamorcer l’agressivité par l’écoute. À contourner les blocages par l’empathie. À transformer les rapports de force en collaborations.
Le piège de la manipulation affective
« Allez, faites un geste, on se connaît bien. » « C’est pour aider une petite entreprise comme la vôtre. » « Entre nous, vous pouvez bien faire un prix. » Ces tentatives de manipulation affective, on les vit régulièrement. Comme si notre genre nous rendait plus sensibles au chantage émotionnel.
L’apprentissage de la fermeté
Cette exposition répétée nous enseigne à séparer l’émotionnel du professionnel. On développe une capacité à dire non avec bienveillance mais fermeté. À maintenir nos prix tout en préservant la relation. À être empathiques sans être naïves.
L’équilibre délicat
Cet apprentissage n’est pas sans écueils. Il faut trouver l’équilibre entre fermeté professionnelle et maintien de relations humaines de qualité. Trop rigides, on perd en authenticité. Trop souples, on se fait effectivement « marcher dessus ».
Transformer les obstacles en force face au défi de l'entreprenariat
Ces défis que nous rencontrons en tant que femmes entrepreneures ne sont ni une fatalité ni un privilège déguisé. C’est une réalité du terrain qui nous pousse à développer des compétences que nous n’aurions peut-être jamais explorées autrement.
La sur-préparation née du questionnement permanent, les techniques de négociation affinées par la nécessité, l’équilibre délicat entre empathie et fermeté… Autant de compétences forgées par l’adversité qui se révèlent être des atouts précieux dans le monde entrepreneurial d’aujourd’hui.
Nous ne prétendons pas que ces difficultés sont souhaitables. Nous ne romantisons pas les inégalités. Mais nous reconnaissons qu’elles nous ont contraintes à développer une approche business plus nuancée, plus collaborative, plus authentique.
L’ironie, c’est que dans un marché en quête de sens et d’authenticité, ces stratégies développées par nécessité deviennent des avantages concurrentiels. Les clients d’aujourd’hui cherchent de la transparence, de l’écoute, de la collaboration. Exactement ce que nous avons appris à maîtriser.
Alors oui, peut-être qu’on se fera parfois « marcher dessus ». Mais chez AU2VI, on a aussi appris à transformer chaque obstacle en opportunité d’innovation. Et ça, c’est une force que personne ne pourra nous enlever.